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Page:Maurras - Kiel et Tanger - 1914.djvu/280

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kiel et tanger

à laquelle le personnel gouvernemental se donnait ? L’esprit public est unitaire. Si l’on veut qu’il mange du prêtre, il ne faut pas lui mettre du Prussien sous la dent. Enfin était-il opportun d’interrompre le précieux courant d’idées qui faisait prévaloir l’idée d’humanité sur l’idée de patrie ? Les journaux officieux des ministres Combes, André, Delcassé, organisaient les fêtes publiques où les artistes des théâtres subventionnés déclamaient des poésies antipatriotes :

Déchirez ces drapeaux ! Une autre voix vous crie :
L’esclavage et la haine ont seuls une patrie.
      La fraternité n’en a pas.

Récemment, la nécessité a ramené ces radicaux à leur antique chauvinisme. Une même nécessité en avait détourné M. Delcassé aux dates marquées ci-dessus. Tous ses coreligionnaires politiques auraient déconseillé comme superflue et dangereuse une agitation patriotique capable de déclasser les partis et de les ramener à l’unité française qui fait leur épouvantail. On n’a point de raison de croire M. Delcassé supérieur à ses compagnons de fortune ; il devait partager leur façon de voir.

Les haines, les rancunes, les misères d’esprit du parti radical étaient si vivantes en lui qu’il ne s’était pas contenté de négliger l’appui de l’opinion française contre l’ennemi du dehors. Plus anciennement, il avait travaillé lui-même à diminuer dans les esprits et dans les choses la force