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Page:Maurras - Kiel et Tanger - 1914.djvu/327

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nous pourrions manœuvrer

vir l’une d’elles ou d’en influencer une autre trop puissamment. Le monde aura donc chance de se présenter pour longtemps, non comme une aire plane et découverte, abandonnée à la dispute de trois ou quatre dominateurs, non davantage comme un damier de moyens et de petits États, mais plutôt comme le composé de ces deux systèmes : plusieurs empires, avec un certain nombre de nationalités, petites ou moyennes, dans les entre-deux.

Un monde ainsi formé ne sera pas des plus tranquilles. Les faibles y seront trop faibles, les puissants trop puissants et la paix des uns et des autres ne reposera guère que sur la terreur qu’auront su s’inspirer réciproquement les colosses. Société d’épouvantement mutuel, compagnie d’intimidation alternante, cannibalisme organisé ! Cette jeune Amérique[1] et cette jeune Allemagne, sans oublier cette vieille Autriche et cette vieille Angleterre qui rajeunissent d’un quart de siècle tous les cent ans auront des relations de moins en moins conciliantes et faciles. Peu d’alliances fermes, mais un plexus de traités et partant de litiges. La rivalité industrielle entre les empires est déjà très âpre ; il serait utopique de chercher de nos jours leur principe d’accord, ni comment cet accord pourra durer entre eux.

  1. On peut suivre les progrès de l’appétit américain dans le livre éloquent du marquis de Barral-Montferrat, De Monroë à Roosevelt (Paris, Plon),