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un gouvernement inhumain

l’espace, de lier ses parties, ses fonctions, ses bureaux. Elle en a besoin d’autant plus qu’elle doit accomplir un travail (ou une « mission ») plus difficile. Les républicains démocrates qui parlent à tout propos de la conscience nationale et de la dignité de la France, celle-ci volontiers conçue comme une personne morale, sont les derniers qui puissent contester la nécessité d’assurer à l’État français les organes sans lesquels on ne peut concevoir ni moralité ni personnalité. Leur État, tel qu’ils l’imaginent ou tel qu’ils le désirent confusément, doit, autant et plus que tout autre, comporter une sensibilité, une intelligence, une mémoire, une réflexion, une volonté générale, afin que la vie simultanée du pays, comme la succession de ses états de conscience, puisse s’y concentrer, s’y connaître, s’y exprimer. Mais, chose curieuse ! ces républicains démocrates, plus ils élèvent le niveau des devoirs qu’il leur plairait de voir pratiquer à la France, moins ils s’occupent de savoir si l’organisation de leur choix est outillée pour les remplir ou même pour en avoir idée.

Les obligations qu’ils imposent à leur pays sont celles d’une humanité angélique, mais pour y faire face, ils lui proposent des moyens et des organes inférieurs encore, et de beaucoup, à ceux dont peuvent disposer l’oursin et l’étoile de mer. Que deviendraient même l’éponge ou le corail, au fond de l’abîme, si la communauté de petits êtres qui les composent se réduisait à subir les impul-