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Page:Maurras - L’Avenir de l’Intelligence.djvu/104

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l’avenir de l’intelligence

bruit qui court que le peuple croit à la vertu de l’intelligence ; ceux qui ont fait cette opinion ne seront pas en peine de la défaire.

Quand on disait aux petites gens qu’un petit homme, simple et d’allures modestes, faisait merveille avec sa plume et obtenait ainsi une gloire immortelle, ce n’était pas toujours compris littéralement, mais le grave son des paroles faisait entendre et concevoir une destinée digne de respect, et ce respect tout instinctif, ce sentiment presque religieux étaient accordés volontiers. L’éloge est devenu plus net quand, par littérature, esthétique ou philosophie, on a signifié gagne-pain, hautes positions, influence, fortune. Ce sens clair a été trouvé admirable, et il est encore admiré. Patience, et attendez la fin. Attendez que Menier et Géraudel aient un jour intérêt à faire entendre au peuple que leur esprit d’invention passe celui de Victor Hugo, puisqu’ils ont l’art d’en retirer de plus abondants bénéfices ! Le peuple ne manque pas de générosité naturelle. Il n’est pas disposé à tout évaluer en argent. Mais lui a-t-on dit de le faire, il compte et compte bien. Vous verrez comme il saura vous évaluer. Le meilleur, le moins bon, et le pire de nos collègues sera classé exactement selon la cote de rapport. Jusqu’où pourra descendre, pour regagner l’estime de la dernière lie du peuple, ce qu’on veut bien nommer « l’aristocratie littéraire », il est aisé de l’imaginer. Le lucre conjugué à la basse ambition donnera ses fruits naturels.

Littérature deviendra synonyme d’ignominie. On