Page:Maurras - L’Avenir de l’Intelligence.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
121
l’ordre positif d’après comte

de la même manière une science de la vie supérieure de l’homme. Cette science sera, comme les autres, relative à des apparences ; mais ces apparences seront, comme les autres, reliées par des lois. Substituer à la recherche des causes et des substances, qui, réelles ou imaginaires, nous demeurent insaisissables, la simple recherche des lois : ce fut la méthode nouvelle. Cette méthode était destinée à fournir la doctrine nouvelle qui serait le principe d’une nouvelle autorité, destinée elle-même à vaincre l’esprit d’examen et à remplacer notre anarchie transitoire par l’ordre nouveau.

Mais l’esprit d’examen n’est pas le seul fauteur de l’anarchie intellectuelle. Il détermine une absence d’ordre qui est presque aussi pernicieuse que cet esprit lui-même. Nos notions acquises, et même les mieux établies, sont mal classées entre elles. À l’intérieur de chaque science, on divise et on subdivise à l’excès. Un esprit cohérent n’y retrouve jamais l’unité dont il garde le modèle et l’amour. Mathématicien de profession, Auguste Comte s’efforça tout d’abord d’organiser chaque embranchement de la science qu’il enseignait. Mais le même ouvrage d’organisation était à construire dans chacune des autres sciences. Dans chacune, en effet, les spécialités luttaient pour la vie, et leurs empires éphémères, succédant à leurs confuses disputations, la balançaient de l’anarchie mortelle à la stérile tyrannie. Les spécialistes s’érigent en seigneurs et en maîtres dans chaque branche ; le souci du détail qui les intéresse noie la conception de l’en-