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l’ordre positif d’après comte

Le Grand-Fétiche anime la cadence de ces beaux vers :

… J’ignorais tout de toi, vierge, ô blanche voisine !
Mais notre pays même avec grâce et douceur
M’a conduit vers le bien qui manquait à mon cœur
Et, m’étant approché du parfum des prairies,
Invité par l’éclat des pelouses fleuries,
Un jour, il m’a suffi, le plus doux de mes jours.
De faire sous mes pas plier leur fin velours.
De suivre à l’abandon le ruisseau qui serpente,
De me laisser aller, comme lui, sur la pente,
D’entendre d’un esprit docile le conseil
Que la forme du sol, sous l’éternel soleil
Avait déposé là, dès l’origine ancienne
Vierge ! et je t’ai trouvée et je t’ai faite mienne !

Les poètes de tous les temps ont dû reconnaître à Cybèle un corps vivant, un esprit, une volonté, des désirs. Mais cette attribution, ordinairement due au souffle de l’instinct, est chez M. de Pomairols systématique[1], et telle que l’esprit de Comte l’eût souhaitée.

Prenons bien garde au caractère principal de ce système, qui est le naturel : l’auteur de la Synthèse subjective ne se flattait pas de créer ses matériaux. À peine eût-il osé dire comme Pascal : « L’ordre est de moi. » L’ordre, en effet, était lui-même inscrit dans la nature des choses. Comte s’est borné à l’y découvrir, et il a composé dans une suite rigoureuse des sentiments, des idées et des habitudes qui, avant lui,

  1. Ch. de Pomairols, Regards intimes (Lemerre, éditeur).