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le romantisme féminin

volume. Cependant, la dernière « table » de la Revue porte en toutes lettres un état civil très complet. Il serait dès lors impardonnable d’écrire un seul mot de Mme de Régnier sans parler de son père et de son mari.

Tout le monde salue en M. de Heredia le chef de chœur de la poésie parnassienne ; on n’a pas besoin de définir le solide éclat de sa poésie, elle-même se définit couleur et son. M. Henri de Régnier n’est guère connu que pour ses romans qui sont spirituels, et sa qualité de poète, de noble poète, ainsi qu’on écrit volontiers.

Ce noble poète fut un des jeunes gens que groupaient, il y a vingt ans, Mallarmé et Verlaine, et qui s’efforçaient de continuer le romantisme par un système de poésie auquel le nom immérité de symbolisme restera. Ils s’efforçaient de jouer des airs moins monotones, moins bruyants que ceux des Trophées et dissolvaient l’alexandrin au lieu de le glacer. Quant au rythme, de peur de le marquer, ils l’oubliaient. Verlaine et Raimbaud avaient fait des vers « délicieusement faux exprès ». M. de Régnier et son groupe firent peut-être exprès de faire des vers faux, mais abominables, résultat qu’ils ne cherchaient point. Cherchant l’abandon et la grâce, ils négligèrent la syntaxe, lâchèrent le style et s’exprimèrent par allusions à peine indiquées.

Ainsi, originaire des Antilles espagnoles, née dans l’un des centres de la déformation imposée au langage, au style et à la poésie, la jeune fille ne changea point