laisser partir… » Et son mari considéra toujours cette excuse comme une plaisanterie de mauvais goût. » Comme elle a trompé cet amant et comme elle confie à son amie Marion le vertueux projet de faire l’aveu de sa faute, la même Gillette prononce ces mots, qui lui valent une bonne réponse : « Quant à l’aveu que je veux faire à Valentin, ne supposes-tu pas que je souffrirai autant à le faire que lui à l’entendre ? — Non, dit Marion nettement : je te connais. »
À la bonne heure ! Cette connaissance parfaite, dont on aime la saveur et la drôlerie, n’exclurait ni la passion sincère ni les sincères folies qui en dérivent. Ce qu’elle exclut, c’est la bonne foi dans l’absurdité et dans l’enfantillage ; c’est le degré de niaiserie dont la poésie romantique ne peut plus se passer. Qui persifle dans la manière d’Anatole France, qui est celle de Jean Racine et de Voltaire, est profondément incapable de recommencer des complaintes à la mode des continuateurs de Victor Hugo. Un effort décisif aurait dû affranchir Mme de Régnier de la mécanique hugolienne. Cet effort n’a pas été fait, et sa personne littéraire en gardera quelque chose de composite.
Ses idées de la vie et son entente même de l’amour-passion dérivent sans contredit de cette source romantique, colorée et vivifiée par les contes de sa négresse. Mais elle a puisé dans l’air de France d’autres instincts. Le charme du livre de prose tient à ce qu’elle y narre sans déclamer. L’auteur y a ressuscité et rajeuni cet amour-goût, qui a été le délice de l’avant-dernier siècle. Et le faible du livre, le défaut de cette œuvre