3° L’indépendance du Mot.
Si, au lieu de le définir par ses origines ou par ses intentions, on analyse les effets littéraires du romantisme ; si l’on se rappelle qu’il désapprit aux écrivains tout art de composer, qu’il nivela profondément les éléments du discours, qu’il plaça le Mot sur un trône, qu’il chassa la beauté au profit des beautés, ces malheurs se retrouvent, à des degrés divers, dans les livres que nous venons de citer et d’extraire. La moins touchée à cet égard, Mme de Régnier encore, ne fait pas toujours exception. Mais l’habile calligraphie parnassienne de Mlle Renée Vivien ne lui a point donné le moyen de construire seulement une strophe complète. Et toutes quatre excellent au chef-d’œuvre du romantisme : les vocables reçoivent ce poids matériel, cette valeur physique, ce ton, ce goût de chair qui, de nécessité, ralentira le mouvement, mais augmentera la puissance de suggestion.
Ainsi se réalise le composé le plus sensuel et le plus capiteux qui se puisse obtenir avec de l’encre et du papier. Chez l’une, les mots, qui lui sont arrivés parfumés et coloriés par ses prédécesseurs[1], deviennent
- ↑ Toute l’école de 1882 a vécu sur la théorie du mot-couleur,