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un théoricien de la monarchie

conjoncture et combinazione : mot admirable que les Français traduisent mal. Toute la politique se réduit à cet art de guetter la combinazione, l’heureux hasard, de ne point cesser d’épier un événement comme s’il était là, l’esprit tendu, le cœur alerte, la main libre et presque en action. Celui qui guette de la sorte ne dédaigne rien. Il sait que, de ce point de vue, les hommes et les choses n’ont que valeur de position ; le propre des tourmentes est justement de renverser la position et, par conséquent, de renouveler les valeurs. La plus petite force, le plus maigre concours peut par combinazione et d’un léger coup de fortune, être affecté soudain d’une puissance inattendue, qui décidera de tout.

— Aucun Empire n’est possible. Eh ! bien, dit Aimée, puisqu’il faut unir la liberté et l’ordre…

— Arrêtez, dit Bruno, pas de République, pas de président, pas de Congrès ! Ces institutions ne valent rien pour la situation de la France.

— Et Napoléon II ? Une régence ?…

Bruno démontre l’impossible. Elle songe à celui qui devait être Louis-Philippe.

— Peut-être ces considérations-là, lui dis-je, pourront-elles décider à appeler M. le duc d’Orléans.

Quand une fois j’eus dit ces paroles, étonnée du chemin que j’avais fait, j’ajoutai :

— Eh bien, trouvez-vous que je vous cède assez. Êtes-vous content ?

— Non, certes, me dit-il, vous embrouillez toutes les questions et vous faites de la révolution. Vous prenez un