Page:Maurras - L’Avenir de l’Intelligence.djvu/47

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
41
grandeur et décadence

pouvait lui opposer sans ridicule, comme un co-contractant sérieux, comme un égal légal, le malheureux ouvrier d’usine perdu au milieu de centaines ou de milliers d’individus employés au même travail que lui, et de ceux qui s’offraient pour remplaçants éventuels.

Les faits économiques, s’accumulant ainsi, révélaient chaque jour le fond absurde, odieux, fragile, des fictions légales. D’autres idées, une autre littérature, un autre esprit, auraient secondé des faits aussi graves, mais les lettrés ne comprenaient du mouvement ouvrier que ce qu’il présentait de révolutionnaire ; au lieu de construire avec lui, ils le contrariaient dans son œuvre édificatrice et le stimulaient dans son effort destructeur. Considérant comme un état tout naturel l’antagonisme issu de leurs mauvaises lois, ils s’efforcèrent de l’aigrir et de le conduire aux violences. On peut nommer leur attitude générale au cours du xixe siècle un désir persistant d’anarchie et d’insurrection. Hugo et Béranger donnaient à la force militaire française un faux sens de libéralisme, et George Sand faussait les justes doléances du prolétariat.

Ainsi tout ce qu’entreprenait d’utile ou de nécessaire la Force des choses, l’Intelligence littéraire le dévoyait ou le contestait méthodiquement.

C’est le résumé de l’histoire du siècle dernier.