ce que le socialisme m’obligera à devenir mon propre libraire ? Serai-je en même temps écrivain, directeur de journal, directeur de revue, et, dieux du ciel ! maître-imprimeur ? J’honore ces professions. Mais je ne m’y connais ni aptitude, ni talent, ni goût, et je remercie les personnes qui veulent bien tenir ma place dans ces fonctions et s’y faire mes intendants pour l’heureuse décharge que leur activité daigne me procurer ; la seule chose que je leur demande, quand traités sont signés et comptes réglés, est de faire au mieux leurs affaires, pour se mêler le moins possible de la mienne qui n’est que de mener à bien ma pensée ou ma rêverie.
Ces messieurs ne feraient rien sans nous, assurément ! Mais qu’est-ce que nous ferions sans eux ? L’histoire entière montre que, sauf des exceptions aussi merveilleuses que rares, les deux classes, les deux natures d’individus sont tranchées et irréductibles l’une à l’autre. Ne les mêlons pas. Un véritable écrivain doué pour faire sa fortune sera toujours bien distancé par un bon imprimeur ou un bon marchand de papier également doué pour le même destin. Le régime socialiste ne peut pas changer grand’chose à cette loi de la nature : il y a là, non point des quantités fixées qui peuvent varier avec les conditions économiques et politiques, mais un rapport psychologique qui se maintient quand les quantités se déplacent.
Qu’espèrent les socialistes de leur système ? Un peu plus de justice, un peu plus d’égalité ? je le veux. Mais, que la justice et l’égalité abondent ou bien