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révèlent au premier travail sérieux ; l’animal transpire au moindre exercice, et, s’il est obligé de faire un voyage de longue haleine, il est bientôt à bout de forces. — Malgré, ou plutôt à cause de cet état de bouffissure, l’acheteur, le plus souvent, est séduit par le poil lustré, onctueux et cette ardeur factice qui fait cabrioler, se cabrer, ou croupionner les chevaux, comme s’ils étaient doués d’une vigueur hors ligne et s’extasie sur cette apparence trompeuse, qui, le plus souvent, détermine le prix.

On ne peut avoir la prétention de défendre au vendeur d’engraisser son cheval, avant la vente, de la manière qui lui convient ; c’est une adresse ou une supercherie qui rend la marchandise attrayante ; et d’ailleurs, si un maquignon présente un animal dans un état d’embonpoint médiocre, l’acheteur n’a pas l’œil satisfait, et suppose que le sujet ne se nourrit pas bien, tandis qu’il devrait méditer ce précepte arabe : « que les plus grands ennemis du cheval sont le repos et la graisse. »

Le temps employé à cette préparation est mis à profit pour commencer l’Éducation ; c’est là que les chevaux se font connaître. On les monte, on les attèle à un char, à un squelette, avec un vieux serviteur, faisant office de maître d’école, puis côte à côte avec ceux qui doivent former paire, et enfin, seuls, loin des curieux, en cas de casse, de défense, d’accident ; et puis on les habitue au pavé, aux embarras de la ville, à la fumée et au sifflet de la vapeur. De cette façon, le marchand apprécie leurs qualités pour les mettre mieux en évidence ; de même que, connaissant leurs vices et défauts qu’il n’a pas pu toujours corriger, il en tire parti pour les dissimuler quand se présente l’acheteur.