attachante occupation accaparait ses pensées, non pas tyranniquement, comme un souci ou un chagrin, mais sans violence, l’incitant seulement à une rêverie calme, tandis qu’il enfouissait les semences et sarclait les allées.
Ce jour-là, il repiqua des poireaux. Il les comptait au fur et à mesure qu’il enterrait dans le sol leurs racines blanches. Et il ne s’ennuyait pas. Il ne pensait à rien qu’à son travail, cependant. Mais cette vie végétative, ce repliement sur lui-même, le reposait, le changeait de la perpétuelle tension quotidienne. Et quand il eut achevé son parc de poireaux, il alla s’allonger dans l’herbe, au pied d’un de ses amis les grands arbres, et il ne bougea plus, il laissa courir sa pensée à la traîne des grands nuages d’ouate qui découpaient sur le bleu vif du ciel la blancheur de leurs cimes de neige. Autour de lui, les masses de feuillage des arbres palpitaient d’une vie frémissante. Quand on fermait les yeux, le chant continu de leurs frondaisons semblait le murmure des vagues. Et le vent frissonnait, prenait corps en les traversant. On le voyait passer d’un arbre à l’autre, ébranler cette immobilité, y mettre comme une rumeur d’éveil. Les branches pliaient doucement. Les feuilles chuchotaient, se frôlaient