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l’aiglon blanc des illinois

nation, appelée La Taupine[1] ; cette femme, de vingt ans plus jeune que son mari, avait pour ce dernier un amour intense, un véritable culte ! La tribu illinoise était prospère, l’Aigle gouvernait ce petit peuple, c’était leur roi ! Un jour néfaste, les Iroquois de trois nations fondirent sur les paisibles Illinois, massacrèrent les hommes, tuèrent aussi les femmes et les enfants, ou les amenèrent en captivité.

Cernée par le nombre, la tribu ne put résister longtemps… sauf l’Aigle, qui se cantonna, avec sa femme sur le rocher et sut si bien en défendre l’accès à ses ennemis, que ceux-ci se lassèrent et partirent avec leurs captifs sans plus s’occuper du chef !

— Son fils était-il né alors ? demanda Membré.

— Non, mais il était attendu. La Taupine, cependant fut tellement effrayée par ce massacre de la tribu qu’elle devint gravement malade.

— La hutte du chef se trouvait donc sur le rocher même, dit Tonty, et ils y étaient restés ?

— Hé ; mais voyant la tribu décimée, les wigwams en partie brûlés, le bourg devenu désert, l’Aigle quitta pour toujours sa demeure illinoise et vint s’établir où nous l’avons vu si récemment.

— Son fils, alors, fit le père Membré, c’est ici qu’il est né ?

— Hé ; mais, là aussi, il y a toute une histoire !

— Raconte, mon brave, nous t’écoutons », dit La Salle. Nika eut un moment d’hésitation, tira une longue bouffée de sa pipe, puis haussa les épaules :

« La mort de l’Aigle, dit-il, m’a délié de mon serment ; je ne crois pas manquer à la loyauté que je devais à mon ami en vous racontant à tous les trois (mais à vous seuls) un événement étrange… surtout puisque la femme de l’Aigle est morte aussi.

« Il y a environ douze hivers, poursuivit Nika, comp-

  1. Un coureur de bois (Pierre Moreau) portait, vers cette même époque, le sobriquet de « la Taupine ».