Page:Maxine - La cache aux canots, 1939.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

des hommes de ta nation qui ont des villages et des maisons ?

Jean soupira un peu, tira une longue bouffée de sa pipe et, regardant rêveusement la fumée qui allait se perdre dans la cheminée, il répondit :

— Je suis natif de Marseille ; j’étais venu en Nouvelle-France pour chercher fortune… ma femme m’accompagnait. Nous quittâmes le port, il y a dix ans, sur un grand voilier qui ramenait dans ce pays monsieur de Maisonneuve, le gouverneur de Ville-Marie, et plusieurs autres personnages. Il y avait aussi à bord une bonne dame du nom de Marguerite Bourgeoys, qui venait, avec des compagnes, établir des écoles en ce pays. À notre arrivée à Québec, je m’installai pour un temps non loin du fort Saint-Louis, et je trouvai bientôt du travail… Puis, à la fin du troisième hiver, ma femme tomba malade… Jeannot avait alors six mois… une fluxion de poitrine emporta la jeune mère et je restai seul avec le petit…

La voix du chasseur se fit rauque, coupée par l’émotion ; il se tut un moment, puis continua :

— Tu ne peux comprendre mon désespoir ! Je ne voulus pas rester à Québec, je partis vers ces régions nouvelles amenant avec moi la fidèle Onata qui adorait l’enfant. Dans la solitude des forêts, j’ai mieux enduré ma peine… et le petit a pris de la santé en grandissant si près des sapins !