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LA HURONNE

cueillait toujours au passage était bien l’âme d’élite que faisait présager son adolescence… Dans sa vie toute simple et sans le savoir, elle était déjà presque une petite sainte !

— Je l’ai connue, moi aussi ! s’écria Marc. Oui, elle était bonne et douce et jolie !… Mais comment donc a-t-elle perdu la vue ?

— J’arrive à la triste circonstance, dit le jésuite. Lors de la prise du Fort Bull par M. de Léry, il se produisit de terribles explosions à cause de la poudre et des grenades qui se trouvaient dans le magasin du fort. Le vieux chef, Le Chamois, fut tué par une explosion. Ginofenn, malgré la défense des gardiens, partit à son tour vers le lieu du sinistre… une nouvelle explosion se produisit, les pierres volèrent en éclats, frappant à la tête la pauvre jeune Huronne…

— Alors ? questionna Marc d’une voix brisée par l’émotion.

Le père s’arrêta un instant et parut chercher dans ses souvenirs, puis il reprit :

— Un soir… je m’en souviens, c’était le 28 mars, je parcourais cette route de la frontière, et je me trouvais à environ un arpent de l’endroit où se dressait auparavant le Fort Bull, lorsque je vis une forme humaine se mouvoir au loin, en dehors de la route… elle allait de côté et d’autre, un bras levé, l’autre resserré sur sa poitrine… Elle semblait errer au hasard, cherchant son chemin sans le voir… Je m’approchai rapidement et crus reconnaître les traits de ma petite Huronne et j’appelai : Ginofenn ! Ginofenn !