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Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/115

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sur les bords du nil


chancela, ses belles plumes s’envolèrent comme une nuée d’oiseaux effarouchés. Le pauvre homme, épouvanté et tout confus, s’agitait de telle sorte, qu’on eût pris ses membres décharnés pour ceux d’un pantin de caoutchouc.

« Maintenant tu saisque je suis bon tireur, criai-je au reïs ; si tu continues à suivre la dahabïe, je te préviens que faute de plumes je ferai sauter ta cervelle. »

La menace eut un effet immédiat ; en quelques minutes le sandal se trouvait hors de portée.

« Nous voilà tranquilles pour l’instant ! dis-je au vieil Hassan.

— Il ne reviendra pas, reprit celui-ci, seulement il nous surveillera jusqu’à ce que nous abordions, et il invoquera certainement la loi contre nous.

— Je ne le crains pas.

— Ni moi non plus, puisque tu es responsable. Mais je crains autre chose.

— Quoi donc ?

— Regarde ! »

Il me montrait le fleuve ; nous comprîmes tout de suite ce qu’il voulait dire.

Depuis quelque temps déjà, nous avions remarqué combien les vagues s’enflaient et couraient rapidement.

En cet endroit, les rives étaient resserrées entre d’énormes rochers ; le courant avait la force d’un torrent ; nous allions traverser un de ces rapides, si dangereux sur le Nil, et qui rendent le commerce si difficile dans ces contrées.

Les passions humaines devaient se taire, car la grande voix des éléments grondait terrible et imposante.

Hassan appela ses hommes en criant :

« Attention, matelots ! voilà les chellal (les cataractes). Prions tous, récitons la sainte fatha ! »

Les hommes se rassemblèrent et entonnèrent les invocations du Coran.

« Garde-nous, ô Seigneur ! O Dieu devant la face duquel le démon reste lapidé !

— Au nom du Dieu très miséricordieux ! » reprenait Hassan.

Puis tous répétaient la fatha, premier verset du Coran.

Les Pirates de la mer Rouge.
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