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Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/166

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les pirates de la mer rouge


aux armes anciennes et d’une construction toute différente des nôtres.

Après nous être assurés que nos revolvers et nos fusils étaient en bon état, et que personne ne s’apercevait de notre évasion, nous nous mîmes en chemin, longeant la côte autant que possible.

La mer dessinait sur ses bords d’innombrables festons, qu’il nous fallait suivre dans leurs détours ; de plus, le sol, tout couvert d’une abondante végétation d’aloès, de coloquintes, etc., n’était point aisé pour la marché. Grâce à Dieu, l’aube vint bientôt nous éclairer et faciliter notre route ; il était environ huit heures lorsque nous aperçûmes les minarets de la ville, puis le sommet de ses murailles.

« Nous devrions demander si c’est bien Djeddah, » remarqua Halef.

Depuis quelque temps, nous rencontrions des Arabes se rendant au marché, mais je n’osais leur adresser la parole.

« Non, repris-je, c’est certainement Djeddah.

— Sais-tu, Sidi, qu’Eve, la mère de tous les mortels, est enterrée en ce lieu ?

— Oui.

— Lorsque Adam l’eut mise en terre, il la pleura quarante jours et quarante nuits, puis il s’en alla à Sland Dib, où il mourut et où il fut enterré. C’est une île que les seuls croyants connaissent.

— Tu te trompes, Halef ; cette île s’appelait autrefois Sinhala Dvipa, ce qui signifie : île des Lions. Elle appartient maintenant aux chrétiens, aux Anglais ; je suis allé plusieurs fois dans ce pays. »

Il me regarda d’un air étonné.

« Nos tolba disent pourtant, Sidi, que l’infidèle ne peut mettre le pied sur cette terre sans mourir.

— Regarde-moi, Halef, suis-je un homme mort ?

— Non ; mais tu es un favori d’Allah, quoique tu ne professes pas la vraie croyance.

— Dis-moi, Halef, n’est-il pas vrai qu’un giaour qui tenterait de pénétrer dans Médine ou à la Mecque serait mis à mort ?

— Oui.

— Il y a pourtant des chrétiens qui en sont sortis vivants.