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Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/165

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les pirates de la mer rouge


me bornai à lui faire remarquer que le sandyk (armoire) était fermé par une serrure de fer.

« Oui, reprit le petit homme, mais je saurai bien l’ouvrir sans clef.

— Le bruit va nous trahir, Halef.

— Tu as raison, Sidi, soupira le pauvre garçon. Il faut donc renoncer à mon argent ! Allons, partons ! »

Au ton dont ces mots étaient prononcés, je compris combien le sacrifice coûtait à Halef, et je regrettai presque d’être obligé de l’exiger ; un autre Arabe ne m’aurait certainement pas obéi. Je fus touché de cette preuve d’un désintéressement si dévoué.

« Halef, tu ne perdras pas ton argent, lui dis-je, je te le rendrai ; je te le promets.

— En vérité, Sidi ?

— Oui, je t’assure.

— Partons donc bien vite. »

Nous quittâmes la cabine, puis regagnâmes heureusement le bord du bâtiment. Entre la rive et le vaisseau, l’espace était plus grand que je ne l’avais cru d’abord ; on le mesurait très bien du regard, dans la demi-obscurité de la nuit. Je savais Halef un habile sauteur, mais ici il ne pouvait prendre d’élan.

« Eh bien, lui demandai-je, crois-tu pouvoir tenter l’aventure ?

— Certainement, Sidi. »

Il grimpa sur le bordage, et d’un bond se trouva de l’autre côté. J’en fis autant.

« Dieu soit loué ! nous voilà libres ! dîmes-nous tous les deux à la fois. Mais où aller à présent ?

— Allons à Djeddah, opinai-je.

— Tu connais la route, Sidi ?

— Non.

— As-tu une karta (carte) pour nous guider ?

— Non ; mais je crois que nous ne nous tromperons pas en nous dirigeant vers le sud. Abou Seïf y est allé à pied, ce qui prouve que la ville n’est pas loin ; avant tout, examinons nos armes. »

Nous nous blottîmes derrière un buisson d’euphorbes qui nous cachait suffisamment, car dans ce pays les plantes ne sont pas rabougries comme au désert. Je trouvai mes armes chargées. Les pirates n’avaient certainement pu les manier ; ils sont accoutumés