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Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/346

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une bataille au désert

« Regardez, dis-je à mes hommes ; ne croyez-vous pas qu’on ait passé par là ?

— On le supposerait, Émir.

— Donc il a bien fallu se servir d’une barque.

— Emir, une barque se briserait dans le torrent, c’est sûr !

— Cherchez toujours. »

Les Haddedîn fouillèrent à droite, à gauche, remontèrent et descendirent le courant, revinrent enfin près de moi sans avoir rien découvert. Je cherchai de mon côté, presque aussi vainement. Pourtant, au bout d’un quart d’heure, je trouvai un… En vérité, je ne sais quel nom donner à cet objet : ce n’était ni un canot ni une barque, mais une longue corde solidement attachée à un arbre non loin de la rive, puis couchée et dissimulée au milieu d’un massif de roseaux ; lorsque je la tirai, je vis qu’elle aboutissait à une sorte d’outre en peau de bouc ; en travers de cette outre se trouvait fixé un morceau de bois destiné probablement à être saisi avec les mains pour se cramponner pendant le passage.

« Voilà l’embarcation ! m’écriai-je ; elle ne peut être brisée par le fleuve ! Je vais traverser ; gardez la rive afin d’empêcher une surprise.

— C’est bien dangereux, Émir !

— Bah ! cette outre sert tous les jours. »

Je jetai bas mes habits, sauf mes pantalons, et je fis gonfler l’outre, dont l’ouverture fut solidement nouée avec une corde de roseaux ; après quoi je recommandai à mes gens de tenir la corde en ne la laissant couler que par petites brassées.

Saisissant fortement le morceau de bois, je m’abandonnai au courant, qui ne tarda point à m’entraîner ; il était si fort, que mes hommes eurent toutes les peines du monde à retenir la corde. Cependant je parvins à aborder, malgré les rudes secousses de mon singulier bateau ; mon premier soin fut de le lier à un tronc d’arbre, après quoi je pris mon poignard à la main et m’avançai au milieu de la forêt de bambous. Je découvris non sans peine un chemin étroit et sinueux se faufilant sous les roseaux. Il me conduisit à une petite hutte de bambous et de joncs. Cette hutte était si basse, qu’on n’eût pu s’y tenir debout ; je me glissai dans l’intérieur. Quelques vêtements restaient accrochés à la paroi ou jetés à terre ; je les examinai avec attention ; ils indiquaient trois pos-