Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
34
UNE AVENTURE EN TUNISIE

— Oui.

— L’as-tu jamais traversé ?

— Non, jamais.

— Alors, remercie Allah, car peut-être serais-tu depuis longtemps réuni à tes pères. Et maintenant tu vas t’y aventurer ?

— Certainement.

— Dieu veuille que mon ami Sadek soit encore en vie !

— Qui est-ce que ton ami Sadek ?

— Mon frère Sadek est le plus fameux guide du Djérid ; il n’y a jamais fait un faux pas.

« Il appartient à la race des Merasig, mais sa mère l’a fait naître à Mouï-Hamed. Il vit avec son fils, qui est un brave guerrier ; tous deux demeurent à Kris.

« Je te le répète, Sidi, il connaît le chott comme pas un ; je ne voudrais te confier qu’à lui.

— Dans combien de temps arriverons-nous près de sa cabane ?

— Dans un peu plus d’une heure.

— Bien, dirigeons-nous un peu vers l’est et cherchons les traces de nos voyageurs.

— Tu crois donc toujours qu’ils vont à Kris ?

— Je ne sais, mais je pense qu’ils ont dû prendre de l’avance pour passer le chott plus tôt que nous. »

Nous ne tardâmes pas à rencontrer un grand nombre de traces récentes ; puis elles devinrent de plus en plus rares, et nous les perdîmes tout à fait. Enfin, à l’endroit où la route tourne vers el Hamma, j’aperçus les deux pieds de devant d’un cheval fortement imprimés sur le sol, et je pus me convaincre du passage des deux fugitifs dans ces parages. Nous suivîmes même la piste jusque dans les environs de Kris, où ils avaient dû reprendre la grande route. Il était évident que les meurtriers rôdaient dans le voisinage. Halef devint soucieux.

« Sidi, puis-je te parler ? demanda-t-il.

— Parle.

— C’est une bonne chose que de savoir lire sur le sable.

— Je suis bien aise de t’entendre en convenir, Halef ; mais nous voilà à Kris, où demeure ton ami ?

— Suis-moi. »

Halef fit avancer son cheval vers quelques palmiers ; sous leur