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à une partie plus ou moins restreinte du bassin de certains fleuves exceptionnels — nos grands fleuves historiques — il s’élargit à un moment donné pour devenir méditerranéen, puis océanique, ou plutôt atlantique, avant de s’universaliser, d’embrasser toute la partie habitable du monde.

C’est ce qu’avait entrevu l’Allemand C. Böttiger, lorsque, dans la préface de son grand volume sur la Méditerranée[1], il écrivait ces lignes mémorables : « La Méditerranée fut ce milieu intermédiaire où s’effectua la transition des anciennes cultures fluviales, du monde potamique, celui que nous représentent encore aujourd’hui la Chine et l’Inde[2], etc., au monde océanique des temps modernes. Ainsi », ajoute-t-il à la fin de cette préface ou les trois milieux, tels que nous les avons retracés plus haut : fluvial ou potamique, méditerranéen ou thalassique et océanique sont déjà explicitement mentionnés, « l’eau n’est pas seulement l’élément vivifiant dans la nature, mais aussi le véritable moteur de l’his-

  1. Das Mittelmeer, Leipzig, 1859.
  2. Le savant auteur, à mon avis, apprécie mal le rôle de l’Inde et de la Chine dans l’histoire collective de l’humanité. Nous verrons plus tard que l’Inde présente l’exemple d’une grande civilisation avortée par suite des conditions défavorables de son milieu géographique ; la Chine, au contraire, certainement plus arriérée que l’Europe occidentale, n’en a pas moins franchi, depuis des siècles, la barre qui sépare la période primaire de l’histoire de sa phase secondaire ou méditerranéenne ; elle se trouve, aujourd’hui, au seuil de la période océanique. Cette loi des « trois milieux » a une portée autrement universelle que ne le supposait l’éminent écrivain.