Page:Meignan - Les évangiles et la critique au XIXe siècle, 1864.djvu/36

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tations désolées. La voix dont je veux parler, parce qu’elle a été longtemps répétée par les échos de la France, est celle de J.-J. Rousseau, dont les malheurs et les fautes ne peuvent faire oublier la généreuse indignation contre les philosophes, ces empoisonneurs du peuple, ainsi qu’il les nommait avec autant de justice que d’amertume. Rousseau est chez nous l’éclatant représentant du déisme. Ni en Allemagne, ni en Angleterre, cette doctrine n’eut un aussi éloquent champion. Rousseau nourrissait une haine profonde contre les athées. Leur présence, et même leur pensée, le mettait en fureur ; et sa colère était pleine de raison, de flamme, de traits sanglants. I1 les estimait ses ennemis personnels. Dans ses livres, dans les réunions brillantes où, malgré son humeur sauvage, il consentait à se rendre quelquefois, dans les cafés où il avait ses habitudes, Rousseau prêchait et tonnait contre la philosophie dominante : heureux mille fois, si, par ses mœurs et ses inconséquences doctrinales, il n’eût détruit d’une main ce qu’il édifiait de l’autre ! En effet, Rousseau niait la révélation. Il célébrait la Providence dans la nature ; il la voyait dans les fleurs, dans les premiers sourires du printemps, dans la fraîcheur du matin, dans le lever du soleil, dans les teintes splendides de son coucher ; et il ne l’apercevait pas dans une religion bienfaisante , apportée du ciel par le Fils de Dieu aux peuples voués fatalement sans elle à la superstition ou à l’incrédulité ! Rousseau et tous les déistes niaient jusqu’à la possibilité de la révélation. Les miracles étaient déclarés