Page:Meillet - Esquisse d'une grammaire comparée de l'arménien classique (1936).djvu/116

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çis բերցիս « tu seras porté », non plus qu’à l’impératif ber-ir բերիր « sois porté ». — L’aoriste en -a- –ա– est employé dans tous les verbes dont le présent est en -i- –ի–, et en outre dans ceux des verbes à présent en -a- –ա–, -u- –ու– dont le sens appelle la forme moyenne, ainsi barkanam բարկանամ « je m’irrite », aor. barkaçay բարկացայ ; zgenum զգենում « je m’habille », zgeçay զգեցայ ; etc.

a) Aoriste radical.

83. — L’aoriste radical répond à des formes thématiques indo-européennes à désinences secondaires. Les formes sont parfois celles d’aoristes, ainsi dans elik ելիք « il a laissé », cf. gr. ἔλιπε (elipe) ; egit եգիտ « il a trouvé », cf. skr. ávidat. Mais elles peuvent aussi bien être des formes d’imparfaits, ainsi eber եբեր « il a porté », cf. gr. ἔφερε (efere), skr. ábharat ; eharç եհարց « il a demandé », cf. skr. ápr̥cchat. En effet l’arménien, ayant constitué un imparfait indépendant de l’imparfait indo-européen, a pu affecter à l’emploi d’aoriste les anciennes formes d’imparfait ; c’est ce qui s’est passé en slave où, un imparfait nouveau ayant été créé, l’imparfait padŭ d’un verbe padõ, pasti « tomber » a pris l’emploi d’aoriste. On sait d’ailleurs qu’il n’y avait en indo-européen qu’une seule différence de forme entre un imparfait et un aoriste : c’est que l’un est accompagné d’un présent (à désinences primaires) du même thème et que l’autre ne l’est pas : le skr. ájanata est l’imparfait du présent jánate ; le gr. ἐγένετο (egeneto) qui y répond lettre pour lettre est au contraire un aoriste, parce qu’il n’y a pas de présent *γενεται (*genetai), mais un présent γίγνεται (gignetai), avec imparfait ἐγίγνετο (egigneto) ; l’arménien a l’aoriste cnaw ծնաւ « il est né », avec la même valeur que le gr. ἐγένετο (egeneto).

Ont des aoristes radicaux les verbes en -ane- –աՆե–, -ani- –անի– et quelques verbes en -e- –ե– et -i –ի– indiqués ci-dessus (§ 75), de plus les verbes en -u- –ու– et ceux des verbes en -nu- –նու– dont le thème ne se termine pas par une voyelle devant -nu- –նու– : ainsi eheł եհեղ « il a versé » (présent hełum հեղում) ; ar առ « il a pris » (présent aṙnum առնում), cf. gr. ἄρετο (areto) ; ǰeṙay ջեռայ « je me suis échauffé » (prés. ǰeṙnum ջեռնում) ; ou, en -eay –եայ, zart‘eay զարթեայ « je me suis éveillé » (présent zart‘num զարթնում), l’aoriste erduay երգուայ « j’ai juré », du thème erdu- երգու– (présent erdnum երգնում) est exceptionnel.