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En des points du monde très divers, et dans des langues très variées, on observe des tabous de vocabulaire, dont on trouvera un aperçu chez Frazer, Rameau d’or, trad. franç., I, p. 331 et suiv. ; dans l’Afrique du Sud, dans le domaine des langues malayo-polynésiennes (y compris Madagascar, v. Van Gennep, Tabou et totémisme à Madagascar, p. 104 et suiv.), en Extrême-Orient et aussi en Europe, notamment dans le Nord de l’Europe, il apparaît que certains mots sont interdits par l’usage, soit à un groupe d’hommes, soit à des individus déterminés ; on taboue par exemple le nom d’un mort, celui d’un chef, celui des membres de la famille où l’on prend femme, etc. ; et le tabou ne touche pas seulement les noms propres en question, mais il s’étend aux noms communs, identiques ou non à ces noms, qui sonnent d’une manière identique ou analogue, ou même partiellement analogue.

On a souvent répété que les langues des peuples peu civilisés changeraient avec une grande rapidité et deviendraient méconnaissables au cours d’une seule