Page:Mendès - La Légende du Parnasse contemporain, 1884.djvu/268

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Ah ! qui dira jamais ton étrange supplice,
Revenant du sépulcre où tous étaient restés !
Qui revivais encor traînant dans les cités
Ton linceul à tes flancs, serré comme un cilice !

Pâle ressuscité qu’avaient mordu les vers,
Pouvais-tu te reprendre aux soucis de ce monde,
Ô toi qui rapportais dans ta stupeur profonde,
La science interdite à l’avide univers !

La mort eut-elle à peine un jour rendu sa proie.
Dans l’ombre tu rentras, spectre mystérieux,
Passant calme à travers les peuples furieux.
Et ne connaissant plus leur douleur ni leur joie.

Dans ta seconde vie, insensible et muet,
Tu ne laissas chez eux qu’un souvenir sans trace.
As-tu subi deux fois l’étreinte qui terrasse.
Pour regagner l’azur qui vers toi refluait ?

— Oh ! que de fois, à l’heure où l’ombre emplit l’espace
Loin des vivants, dressant sur le fond d’or du ciel
Ta grande forme aux bras levés vers l’Éternel ;
Appelant par son nom l’ange attardé qui passe ;