Page:Mendès - La Légende du Parnasse contemporain, 1884.djvu/267

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Sur son front reluisant de la pâleur des morts,
Ses yeux ne dardaient pas d’éclairs ; et ses prunelles,
Comme au ressouvenir des splendeurs éternelles,
Semblaient ne pas pouvoir regarder au dehors.

Il allait, chancelant comme un enfant, lugubre
Comme un fou. Devant lui la foule s’entr’ouvrait.
Nul n’osant lui parler, au hasard il errait,
Tel qu’un homme étouffant dans un air insalubre.

Ne comprenant plus rien au vil bourdonnement
De la terre ; abîmé dans son rêve indicible ;
Lui-même épouvanté dans son secret terrible.
Il venait et partait silencieusement.

Parfois il frissonnait, comme pris de la fièvre,
Et comme pour parler il étendait la main ;
Mais le mot inconnu du dernier lendemain.
Un invisible doigt l’arrêtait sur sa lèvre.

Dans Béthanie, alors, partout, jeunes et vieux.
Eurent peur de cet homme ; il passait seul et grave ;
Et le sang se figeait aux veines du plus brave.
Devant la vague horreur qui nageait dans ses yeux !