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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/311

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FRÉDÉRICK

qu’à lui. Quoi ! il venait de voir cet être fantasque et prodigieux, exalté et rabaissé, adoré et haï, qui, à force de génie et d’audace, avait secoué la léthargie allemande, avait imposé aux plus flegmatiques l’enthousiasme ou la colère, ce révolutionnaire qui s’était jeté à travers l’art, rompant les vieilles règles, ruinant les fausses gloires et violant l’antique musique pour engendrer en elle le drame vivant et palpitant, enfin Hans Hammer, ce fou, Hans Hammer, ce dieu !

Instinctivement Frédérick le suivit. Voulait-il le voir encore, lui parler ? Il ne savait pas. Il montait l’escalier, derrière l’illustre musicien-poëte ; mais il tremblait, et si le compositeur s’était retourné, le prince se serait enfui, comme un enfant pris en faute.

Au premier étage, Hans Hammer disparut derrière un battant vivement refermé, et la servante, qui était montée aussi, dit à Frédérick, en ouvrant une porte voisine : « Voici votre chambre, monsieur. »

Frédérick s’assit sur le bord du lit, et songea, ne comprenant pas ce qui se passait on lui-même. Que signifiait cette émotion qui l’avait pris tout