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LE ROI VIERGE

nants, de robes galonnées aux manches pendantes, d’aumônières et d’épées, et de coiffes à plumes, heurtaient dans les couloirs les corbeilles poussiéreuses ou les candélabres en carton d’or des garçons d’accessoires ; dans les escaliers tournants dégringolaient les choristes dames et les choristes hommes, les figurantes et les figurants, elles trop fardées, eux le menton bleu, — malgré l’ordre de se raser de près affiché dans le foyer des chœurs, — tous maussades et ternes sous leurs velours passés et leurs satins qui se fripent ; quelques loges étaient pleines de l’éternelle querelle des ténors avec leurs coiffeurs, et, dans d’autres, des soprani, en corset rose et noir, se faisaient lacer leurs bottines par une femme de chambre agenouillée, pendant que, le cou tourné vers le miroir de la toilette, elles passaient légèrement une patte de lièvre sur leurs joues pour harmonier au blanc de perle la rougeur trop crue du vermillon ; et il y avait par tout le théâtre — bruits de portes, grincements de gonds, fracas d’un portant qui tombe, flou-flous de soie légère, chuchotements, appels, jurons, et rumeurs lointaines de l’orchestre qui s’accorde — ce va-et-vient affairé, fiévreux, ce bouleversement con-