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LE ROI VIERGE

pées tournantes ; il s’arrêta, ayant honte, — pour la dernière fois ; bah ! il déchira l’affiche, cracha sur la vitrine et se détourna en haussant les épaules. C’était fini.

Il se tint derrière le théâtre, près de l’entrée des artistes, fréquenta les abords du Conservatoire. Il allait et venait sur le trottoir, les mains dans les poches, la blouse et la chemise ouvertes, s’offrant à qui voulait pour suivre des femmes ou porter des lettres. Il fut remarqué. Les étudiants amoureux de choristes s’adressaient à lui, avec timidité, parce qu’il semblait exercer une fonction. On savait qu’il était très bien avec le concierge du théâtre. Il avait autour de lui le mystère d’être quelqu’un qui entre dans les coulisses. Lorsqu’il était redescendu, apportant une réponse, puis attendait, avec un dandinement de jambes, la pièce de monnaie promise, les adolescents troublés, regardaient avec une surprise où il y avait de l’épouvante celui qui avait traversé tranquille, l’Éden prodigieux du théâtre ; et ils humaient, dans l’odeur de ses haillons, des parfums de fruits défendus. Un soir qu’il avait de la poudre de riz sur la manche de sa blouse, il s’écria en français, car il commençait à renoncer