Une estafelte, qui vient de la porte Maillot, crie à un groupe formé sur la place du Nouvel-Opéra :
— Nous sommes vainqueurs ! Flourens est entré à Versailles à la tête de quarante mille hommes ! On a pris cent députés. M. Thiers est prisonnier.
D’autre part, on dit que, ce matin, dans la débandade autour du Mont-Valérien, Flourens a disparu. Où aurait-il pu trouver quarante mille hommes pour les conduire à Versailles ?
En même temps, un bruit se répand d’après lequel le général Bergeret aurait été grièvement blessé par un éclat d’obus.
— Pure exagération ! dit quelqu’un. Le général a eu seulement deux chevaux tués sous lui.
Devant lui, plutôt, puisqu’il était en voiture.
Ce qui paraît plus certain, c’est qu’on se bat avec fureur entre Sèvres et Meudon. J’entends dire que le 113e régiment de ligne a levé la crosse en l’air, et que les Parisiens ont pris douze mitrailleuses aux Versaillais.
À Châtillon, on se bat aussi. Les communalistes ont remporté de grands avantages. Pourtant un curieux, qui s’est dirigé de ce côté, annonce qu’il a vu rentrer trois bataillons à l’air peu triomphant, et que d’autres bataillons, formant la réserve, ont refusé de marcher.
Tohu-bohu de contradictions, où la plupart des nouvelles n’ont d’autres sources que l’opinion et l’espérance de celui qui les colporte. Le résultat seul permettra d’apprécier ce qui s’est passé. Un instant je renonce à m’informer ; mais, malgré moi, j’interroge ; le désir de savoir l’emporte sur la certitude de ne rien apprendre.