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LES OISEAUX BLEUS

sors du plus riche des monarques, voilà ce qui étincelait sous ses yeux, ce qui ruisselait entre ses doigts, à l’heure même où il tendait aux passants sa main contente de recevoir un sou de cuivre ; si on l’eût placé entre deux portes, celle du paradis et celle d’un coffre-fort, ce n’est pas la porte du paradis qu’il eût ouverte. Quant au petit Aloys, — plus joli et plus frêle que ses compagnons, — il ne s’inquiétait aucunement des palais, des courtisans, des ambassadeurs, ni des armées ; à une table chargée d’or, il eût préféré un coin de prairie en fleurs. Avec son air d’adolescent, d’adolescente même, il baissait volontiers ses yeux attentifs aux coccinelles qui escaladent les brins d’herbe, ne les levait que pour admirer à l’horizon la rougeur des juvéniles aurores, ou celle des couchants pensifs. La seule joie qu’il désirât, — et il l’avait, — c’était de chanter en marchant la chanson qu’il avait faite la veille, une chanson aux belles rimes, que les oiseaux approuvaient, dans les buissons de la route, en reprenant le refrain. De sorte que si, le soir, dans le clair silence des étoiles, s’éveillait,