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LA PETITE FLAMME BLEUE

en torrents de sapins et de rocs ; et la nuit était noire parce que la tempête avait éteint toutes les étoiles. Vous pensez si l’enfant eut peur pour la petite flamme bleue ! Certainement, elle ne pourrait pas résister, si chétive, à l’acharnement des vents. Réfugié dans la crevasse d’un mont qui ne s’était pas encore écroulé, il essayait, joignant les mains, de la garantir, autant que possible, de la forcenée bourrasque ; mais un redoublement de tempête s’engouffra dans le creux de la roche ; il fut renversé, tomba sur les pierres, défaillit, le front saignant. Quand il sortit, le lendemain, de pâmoison, il se prit à pleurer. Le moyen d’espérer que la jolie lueur n’était pas morte dans cette nuit formidable où les astres eux-mêmes avaient cessé de briller ? Mais il vit, à travers ses larmes, un reflet tremblant de clarté sur un marbre tombé là. Ô adorable prodige ! Il avait toujours au front la petite flamme bleue.

Quelques semaines plus tard, par une tiède matinée de juin, — marchant toujours vers le jardin de la Joie et des Rêves, — il traversait