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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/127

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MÉPHISTOPHÉLA

Triple brute que je suis ! Ce n’est pas du mariage que tu avais peur, c’est du mari. Mais, sacré mille tonnerres ! puisque je te fais horreur, pourquoi m’as-tu épousé ?

Il s’arrêta pour lui dire, en face, pas de trop près :

— Parle, réponds, je veux que tu répondes, pourquoi m’as-tu épousé si tu ne m’aimes pas ?

Elle demeurait toujours sans parole, sans mouvement, avec des yeux de folle. Exaspéré, frappant du pied, trépignant presque, il reprit :

— Tu m’entends ? tu entends ce que je te demande ? tu vas répondre, j’espère ? Ah ! réponds ! Si tu ne réponds pas, prends garde !

Le même silence, la même furieuse immobilité. Il n’y tint plus, il s’élança sur elle :

— Tu parleras ! tu parleras !

Mais, tout près de Sophie, le courage lui manqua, il ploya les jarrets, il sanglota.

— Oh ! pardonne, je crie, je m’emporte. J’allais te faire du mal, moi qui t’adore ! Mais enfin, aussi, tu es là, tu ne dis rien, et tu me regardes d’une si affreuse façon. Oh ! je ne menace plus, non, je te prie, je te supplie, je te conjure, je t’implore, parle-moi, dis un mot, un seul mot. Dis-moi que je me trompe, que tu ne me détestes pas ; ou, si tu me détestes, explique