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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/403

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MÉPHISTOPHÉLA

vélé où l’Éternel Féminin consacre des noces d’anges extasiées. Mais, ce paradis, à quoi bon ? puisque, dès cette terre, avec toutes les pudeurs et toutes les ardeurs, s’enchantent, hors de la fange virile, la belle chair et l’âme des amantes.

Et Magalo avait dit aussi : « défendu ! » Pensée plus stupide encore, bien digne d’une médiocre et banale créature, faussement extraordinaire, bourgeoise en réalité malgré ses apparences de bohème affolée, et en qui l’insuffisance de l’orgueil impliquait l’épouvante de la révolte, l’admiration de l’ordinaire, et ce besoin de considération dans la vie et de pardon au-delà, dont se tourmentent un jour ou l’autre les âmes sans vraie hardiesse. Défendu, par qui ? Celui qui rêve, en la solitude de sa divinité, à l’éternelle évolution des mondes, ne s’inquiète guère du sexe des éphémères bouches unies ; et le ciel s’allume d’étoiles indifférentes sur toutes les veillées d’amour. Défendu, pourquoi ? Est-ce que le désir, quel qu’il soit, n’entraîne pas, chez celui ou chez celle qui l’éprouve, le droit d’y obéir ? Est-ce que tout ce qui est convoitable n’est pas fait pour être possédé ? Vouloir a pour prérogative : pouvoir. À qui a faim, il est permis de manger ; à qui a soif, de boire ; les vivants seraient les dupes de la vie, si elle opposait à