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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/411

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MÉPHISTOPHÉLA

monie ; au fond, l’exhaussement d’un dressoir chargé d’orfèvreries et de chandeliers d’argent imitait un radieux autel. Et des murs ouverts par quelque tout-puissant sortilège, s’avancèrent de jeunes femmes, deux à deux. Bien qu’elles ressemblassent à Germaine Trièzin, à Rose Mousson, ou à Séraphine Thevenet, ou à Vivette Chanlieu, toutes ne portaient [pas] des costumes de Parisiennes[1]. Quelques-unes, comme issues du lointain passé, montraient des visages et des seins peints d’un fard jaune, qui sentait le safran, et, les jambes nues sous une transparence de mousseline lamée, elles avaient à leurs chevilles des clochettes comme les gandharvis du paradis d’Indra ; et elles menaient en laisse des panthères familières. D’autres, qui brandissaient des thyrses ou heurtaient des crotales, étaient vêtues, comme les ménades des peintures, de pourpres déchirées par l’ivresse ; d’autres, offrant dans des corbeilles des lys et des colombes, imitaient les naïades des antres humides, habillées d’une étoffe tramée de verdure et d’air ou de la brume d’eau qui s’envole des sources ; et derrière celles-ci, venaient des Aragonaises de satin rouge et de dentelle noire, cambrées jusqu’à rompre, des Romaines à la peau mate où s’ouvrent deux trous de flamme, casquées de chevelures d’ébène, et

  1. ndws. La correction du « pas » manquant est faite dans l’édition Fasquelle, 1903 (édition définitive), p. 285.