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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/516

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MÉPHISTOPHÉLA

— Te voilà, toi ! allons, entre. Ça t’étonne que j’ouvre la porte ? qu’est-ce que ça fait ? tu viens pour voir Silvie, entre donc, qu’attends-tu ?

D’abord Sophor sourit. Une pensée, presque amusante, venait de lui traverser l’esprit. Céphise ? chez Silvie ? est-ce que, par hasard ?… Eh bien ! pourquoi non ? Mais la comédienne avait le visage singulièrement pâle ; et sa voix saccadée, tout son air, effaré, hagard, ne permettait à Sophor de croire qu’elle interrompait une tendre mêlée sur la chaise longue ou les peaux d’ours blanc. Elle eut au contraire l’impression qu’il s’était passé ou qu’il allait se passer quelque chose de violent, de formidable ; une curiosité lui vint. Il y avait longtemps qu’elle n’avait pas été curieuse. Elle suivit Céphise. À peine dans l’atelier, où rien n’avait été changé, où riait toujours le joli désordre dont s’amusa jadis le va-et-vient de tant de belles filles, Céphise posa brutalement la lampe sur une petite table, devant la lustrine verte qui voilait la table à modèle, puis, se tournant vers Sophor :

— Oui, je suis ici, moi ! dit-elle ; et, tu sais, nous avons à causer.

Mme d’Hermelinge s’assit.

L’autre, allant et venant, parlait, avec des grincements de dents quelquefois :