Page:Mercœur - Œuvres complètes, I, 1843.djvu/380

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N’as-tu pas vu (jadis si long-temps infécond),
          Plein des flots d’une sève amère,
          Un rameau du cyprès d’Homère
Mêler son noir feuillage au laurier de Byron ?

Homère !… il apparat presque au matin du monde :
L’univers s’enferma dans son âme profonde.
En livrant son esquif aux tempêtes du sort,
Du culte poétique, hélas ! prêtre et victime,
Lui seul se comprenait dans sa douleur sublime,
          Et pour vivre attendait la mort.

Mendiant, fugitif, sous les cieux d’Ionie
Tu prodiguas l’outrage à son malheur sacré.
L’infortune ici-bas est la sœur du génie :
Sa main de plomb s’étend sur un front inspiré.
Mais elle pèse en vain sur sa tête indigente :
Il chante, souffre, meurt, et son ombre géante
Reçoit de l’avenir des siècles pour instans.
Le passé dans son gouffre abîme en vain les âges :
Sur une mer de gloire, aux ondes sans rivages,
Homère est là, debout, en monarque du temps.

De sa grande raison laissant briller la flamme,
Socrate sur tes dieux lève les yeux de l’âme ;
Et lui seul ose voir la suprême clarté.
Bientôt, calme à leur bruit quand se heurtent ses chaînes,