Page:Mercœur - Œuvres complètes, I, 1843.djvu/63

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« Comme cette histoire-là est triste, ma petite maman ! Quel malheur que ce ne soit pas un conte !

— Et pourquoi trouves-tu si malheureux que ce ne soit pas un comte, ma chère mignonne ?

— C’est parce qu’on sait bien, vois-tu, quand on lit un conte, que ce n’est pas la vérité, et qu’alors on ne s’afflige pas ; au lieu que l’histoire, c’est bien différent, tout y est vrai, n’est-ce pas, maman ?

— Oui, quant aux faits recueillis par les historiens, comme tu le vois dans le Précis sur les Maures. Mais quand un écrivain prend un de ces faits pour en faire un outrage, en un ou plusieurs volumes, quoiqu’il consulte dans l’histoire les principaux événemens arrivés aux personnages qu’il veut mettre en scène et qu’il étudie leur caractère, tu sens bien que, malgré tout cela, ma chère petite, il est obligé d’ajouter beaucoup du sien. Ainsi tu vois que, dans ces sortes d’ouvrages, le fond seul appartient à l’histoire, et que les détails appartiennent à l’auteur ; et ce sont ces détails qui lui coûtent tant de combinaisons (car il faut qu’ils paraissent si essentiellement liés à l’histoire, que le lecteur croie qu’ils en font partie) qui donnent, par