Page:Mercœur - Œuvres complètes, I, 1843.djvu/95

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faite, au lieu que si elle l’était, tu n’endurerais pas de misère au moins [1].

— Ma bonne amie, je crois tous les revers de fortune possibles. Ceux arrivés à ma famille par le remboursement des assignats, et dont je me trouve victime, ne peuvent, tu le sens, me laisser aucun doute à cet égard ; mais dussé-je avoir la certitude de perdre tout ce que je possède et n’entrevoir d’autre perspective pour le procurer l’existence que d’être réduite aux travaux les plus durs, eh bien ! je m’opposerais encore de tout mon pouvoir à ce que tu fisses ta tragédie avant d’avoir atteint l’âge de raison !

— Et pourquoi donc, ma petite maman ?

— C’est qu’à ton âge, mon Élisa, un enfant ne doit point se livrer à des travaux sérieux ; il doit jouer, promener et dormir beaucoup, et employer les instans qui lui restent à apprendre les premières choses qu’il est obligé de savoir ; voilà sa tâche, tandis que toi, si tu ne quittais pas l’étude, si tu persistais à faire main-

  1. J’avais beau représenter à Élisa toutes les difficultés qu’il fallait vaincre pour réussir à faire une tragédie, espérant par là la faire renoncer à son projet ; mais rien n’était capable de la rebuter, tant le désir de faire ma fortune lui faisait passer par dessus tout ce que je lui opposais.