Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/122

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Si on levoit les yeux vers le sommet du temple, on voyoit le ciel à découvert ; car le dôme n’étoit pas fermé par une voûte de pierre, mais par des vitraux transparens. Tantôt un ciel clair & serein annonçoit la bonté du Créateur ; tantôt d’épais nuages qui fondoient en torrens, peignoient le sombre de la vie & disoient que cette triste terre n’est qu’un lieu d’exil : le tonnerre publioit combien ce Dieu est redoutable lorsqu’il est offensé ; & le calme des airs qui succédoit aux éclairs enflammés annonçoit que la soumission désarme sa main vengeresse. Quand le souffle du printems faisoit descendre l’air pur de la vie, comme un fleuve balsamique ; alors il imprimoit cette vérité salutaire & consolante, que les trésors de la clémence divine sont inépuisables. Ainsi les élémens & les saisons, dont la voix est si éloquente à qui sait l’entendre, parloient à ces hommes sensibles & leur découvroient le maître de la nature sous tous ses rapports[1].

On n’entendoit point de sons discordans. La voix des enfans mêmes étoit formée à un plein chant majestueux. Point de musique sautillante & profane. Un simple jeu d’orgue (lequel n’étoit point bruyant,) accom-

  1. Un sauvage errant dans les bois, contemplant le ciel & la nature, sentant, pour ainsi dire, le seul maître qu’il reconnoît, est plus près de la véritable religion qu’un chartreux enfoncé dans sa loge & vivant avec les fantômes d’une imagination échauffée.