Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/130

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à une échelle brillante & graduée, qui l’approche à chaque pas de la plus grande perfection. Dans ce voyage, elle ne perd point le souvenir de ce qu’elle a vu, de ce qu’elle a appris ; elle conserve le magazin de ses idées, c’est son plus cher trésor ; elle le transporte par-tout avec elle. Si elle s’est élancée vers quelque découverte sublime, elle franchit les mondes peuplés d’habitans qui sont restés au-dessous d’elle ; elle monte en raison des connoissances & des vertus qu’elle a acquises. L’ame de Newton a volé par sa propre activité vers toutes ces spheres qu’il avoit pesées. Il seroit injuste de penser que le soufle de la mort eût éteint ce puissant génie. Cette destruction seroit plus affligeante, plus inconcevable que celle de l’univers matériel. Il seroit de même absurde de dire que son ame se seroit trouvée de niveau à celle d’un homme ignorant ou stupide. En effet il eût été inutile à l’homme de perfectionner son ame, si elle n’eût pas dû s’élever, soit par la contemplation, soit par l’exercice des vertus ; mais un sentiment intime, plus fort que toutes les objections, lui crie : développe toutes tes forces, méprise la mort ; il n’appartient qu’à toi de la vaincre & d’augmenter ta vie qui est la pensée.

Pour ces ames rampantes, qui se sont avilies dans la fange du crime ou de la paresse, elles retournent au même point d’où elles