CHAPITRE XXIV.
Le Prince Aubergiste.
Vous voulez dîner, me dit mon guide,
car la promenade vous a ouvert l’appétit ?
Eh bien ! Entrons dans cette auberge…
Je reculai trois pas. Vous n’y pensez pas,
lui dis-je, voilà une porte cochere, des armes,
des écussons. C’est un prince qui demeure
ici. — Eh, vraiment oui ! C’est un bon
prince, car il a toujours chez lui trois tables
ouvertes ; l’une pour lui & sa famille,
l’autre pour les étrangers, & la troisième
pour les nécessiteux. — Y a t-il beaucoup de
tables pareilles dans la ville ? — Chez tous
les princes. — Mais il doit s’y trouver bien
des parasites fainéans ? — Point du tout : car
dès que quelqu’un s’en fait une habitude &
qu’il n’est pas étranger, alors on le remarque,
& les censeurs de la ville en sondant
ses dispositions lui assignent un emploi ; mais
s’il ne paroît propre qu’à manger, on le bannit
de la cité, comme dans la république
des abeilles on chasse de la ruche toutes celles
qui ne savent que dévorer la part commune.
— Vous avez donc des censeurs ? —
Oui, ou plutôt ils méritent un autre nom :
ce sont des admonesteurs qui portent par-