Aller au contenu

Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/312

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Malgré tant de remparts, de barrières, de précautions, afin que le monarque n’oublie point, en cas de calamités publiques, ce qu’il doit aux pauvres, il observe chaque année un jeûne solemnel qui dure trois jours. Pendant ce tems notre roi souffre la faim, endure la soif, est couché sur un grabat : & ce jeûne terrible & salutaire lui imprime dans le cœur une commisération plus tendre envers les nécessiteux. Notre souverain n’a pas besoin, il est vrai, d’être averti par cette sensation physique ; mais c’est une loi de l’État, une loi sacrée, jusqu’ici suivie & respectée. À l’exemple du monarque, tout ministre, tout homme qui touche aux rênes du gouvernement, se fait un devoir de sentir par lui-même ce que c’est que le besoin

    sement, il prit séance aux assemblées de la nation, & cette noblesse fiere & barbare le vit, sans se soulever, associé aux ordres du royaume, quoique les tems fussent encore tout remplis des préjugés de la police des fiefs & de la profession des armes. L’honneur françois, principe toujours agissant, supérieur aux plus sages institutions, pourra donc devenir un jour l’ame d’une république, surtout lorsque le goût de la philosophie, la connoissance des loix politiques, l’expérience de tant de maux auront détruit cette légéreté, cette indiscrétion, qui dénaturent ces brillantes qualités qui feroient des François le premier peuple de l’Univers, s’il savoit mesurer, mûrir & soutenir ses projets.