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Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/204

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Démon. Il fit un effort prodigieux pour viser son adversaire ; mais son fusil n’était pas encore placé horizontalement, lorsque Pélasge, comptant toujours, disait :

« Quatre, cinq… »

Au mot cinq le second coup de Démon partit. M. des Assins tira presque en même temps, ou plutôt son doigt pesa convulsivement sur la gâchette ; sa balle frappa dans la poussière, à dix pas de lui, et rebondit pour aller se perdre dans les grandes herbes. Il fléchit sur ses jarrets, lâcha son fusil, et s’assit en s’appuyant sur sa main droite. Ses amis coururent à lui ; l’un d’eux arriva juste à temps pour le soutenir. Sa tête se renversa, son chapeau roula dans la poussière. Des flots de sang rougirent sa chemise. La seconde balle de Démon, comme la première, avait traversé la poitrine de part en part. M. des Assins respirait encore, mais lentement et de plus en plus faiblement. Sa bouche était largement ouverte, et toute pâle ; ses yeux, tournés en haut, roulaient de droite à gauche et de gauche à droite.

M. de Lauzun, presque aussi pâle que M. des Assins, donna un coup de coude au médecin, en lui disant :

« Eh bien ! Docteur, vous ne faites rien ; mais faites donc quelque chose, cet homme est blessé ! .

« Imbécile ! il est mort, répondit le médecin.

« Mort ! » répéta M. de Lauzun d’une voix étranglée.

M. des Assins ne respirait plus ; ses amis l’étendirent sur le sol. Ils se groupèrent un peu à l’écart, et se parlèrent à demi-voix.

Pélasge, Démon et M. Héhé furent obligés de passer devant le cadavre, pour se rendre à leur voiture. M. de Lauzun arrêta M. Héhé, et après l’avoir regardé un bon moment, d’un air effaré, il lui dit :

« Mort !

« Je le vois bien, mille tonnerres ! répondit M. Héhé ; que le diable vous emporte, vous et votre maudite lettre ! »

Les amis de M. des Assins n’étaient pas venus sur le terrain, pour assister à sa défaite ; lui mort, plus d’amitiés.