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Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/225

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au caractère concentré et triste, qui ne parlait jamais, à moins qu’une impérieuse nécessité ne l’y contraignît. De temps en temps, il écrivait à Nogolka ; il n’avait jamais cessé de correspondre avec elle. Elle était la seule attache qu’il eût en Europe ; il avait perdu son père et sa mère dont il était le seul enfant ; l’éloignement et le temps avaient effacé ses traits et même son nom de l’esprit de ses anciens amis. Depuis que la mort avait fait le vide autour de lui, ses lettres à Nogolka étaient devenues plus fréquentes et plus longues. Il s’épanchait volontiers avec elle ; de son côté elle lui parlait à cœur ouvert. Elle n’avait jamais cessé de l’aimer, et elle ne s’en cachait pas. Elle était pourtant mariée. Elle aussi, elle avait perdu ses parents. Après leur mort, se trouvant seule au monde, elle avait fini par céder aux instances d’un vieux noble russe qui l’aimait passionnément. Elle avait un fils de treize ans et une fille de dix.


CHAPITRE XLIX

Le Comte Casimir Dziliwieff



Le mari de Nogolka, le comte Casimir Dziliwieff, était un de ces beaux vieillards verts et actifs qui feraient aimer la vie même aux plus indifférents, tant ils la prennent à cœur et s’appliquent à en user noblement. Il avait un caractère chaud et enthousiaste, un esprit large, une volonté de fer. Nogolka, avant d’accepter ses offres, lui avait déclaré franchement qu’il y avait en Amérique un homme qu’elle aimait, et qu’elle l’aimerait tant qu’elle vivrait. Dziliwieff avait admiré cette franchise ; il y avait