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Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/62

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« Continuons notre promenade, voulez-vous ? demanda Pélasge.

« Oui, Monsieur, allons voir le sachem. »

Vieumaite avait fait abattre, autour du patriarche des chênes, tous ceux qui le gênaient en empêchant l’air de circuler librement entre ses branches. Il avait tracé lui-même, avec une charrue tirée par ses quatre chevaux les plus beaux, un sillon circonscrivant au large l’arbre majestueux qui désormais prenait un caractère sacré ; car, un tombeau construit dans son ombre tranquille, venait de recevoir les restes mortels des parents de Vieumaite. Une rangée de beaux cyprès originaires de la Provence, avait été plantée dans le creux circulaire. Ils avaient crû avec vigueur, et n’avaient pas tardé à opposer aux animaux une barrière infranchissable. Une porte en chêne presque noir, permettait de pénétrer dans l’enceinte du côté du couchant. Un vieux nègre hors de service était préposé à la garde de ce lieu saint ; à lui était confiée la clef de la porte ; une fois par semaine, il enlevait les ramilles sèches et les feuilles mortes qui tombaient du sachem. Il habitait une petite cabane, qu’on voyait dans la clairière et qu’ombrageaient des bananiers et des orangers.

Les racines supérieures du sachem, saillantes et tortueuses, serpentaient au loin sur le sol, semblables à d’énormes tentacules. Le tronc montait comme une tour ; à une hauteur de trente-cinq mètres, il émettait d’abord cinq branches horizontales, dont chacune était plus grosse que le tronc d’un chêne ordinaire. Ces branches en s’éloignant de la tige, fléchissaient insensiblement sous leur propre poids et allaient au loin balayer le sol de leurs dernières ramifications. Les autres branches s’élevaient plus ou moins obliquement, subdivisées en rameaux et ramuscules dont l’ensemble, vu extérieurement, avait l’apparence d’un dôme colossal.

Le vieux gardien du sachem s’entendant appeler et reconnaissant la voix de son petit maître, sortit de sa cabane et vint ouvrir.

Il fallut écarter le feuillage, pour pénétrer sous la voûte