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Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/94

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Un frisson d’horreur passa sur tous les cœurs.

M. de Lauzun, le sourire sur les lèvres, partit comme un éclair et revint de même.

Saint-Ybars prit la baleine, et répéta :

« À genoux !

« Non, répondit fièrement l’enfant ; on se met à genoux devant Dieu seul. »

Saint-Ybars marcha vers son fils. La colère le rendit hideux ; il fit horreur et pitié à Pélasge.

« Pour la dernière fois, hurla-t-il, à genoux. »

Démon était affreusement pâle, mais résolu ; il répondit en relevant la tête :

« Non ! »

La baleine siffla, et deux fois le cingla entre la tête et l’épaule. Il tint bon ; la douleur remplit ses yeux de larmes, mais il eut le courage de n’en pas laisser tomber une seule.

« Te mettras-tu à genoux cette fois ? demanda le père d’une voix qui tenait plus de la bête féroce que de l’homme.

« Moins que jamais ! » répondit Démon.

Pélasge se leva, et se mettant entre le père et le fils :

« De grâce, Monsieur, dit-il, revenez à vous ; ce que vous faites là est horrible ; il y a d’autres manières de punir plus dignes de vous et de votre fils.

« Ah ! vous voulez me donner des leçons, à moi aussi, » cria Saint-Ybars avec un rire chevrotant.

Et, employant avec intention le terme dont on se sert en Louisiane pour chasser les chiens, il ajouta :

« Passez ! »

Pélasge sentit l’outrage, mais il se contint.

« Passez ! vous dis-je, vociféra Saint-Ybars en secouant sa baleine ; sinon, je vous coupe la figure. »

Nogolka courut se mettre entre les deux adversaires. Pélasge l’écarta doucement.

« Non, Monsieur, dit-il, vous ne le ferez pas : vous savez bien que si vous étiez assez malheureux pour vous oublier à ce point, il faudrait que l’un de nous deux disparût de ce monde.