Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/174

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Le lendemain parut une affiche :

À VENDRE

Un Bonnet rouge, doublé de taffetas tricolore, avec une riche houppe de soie. S’adresser au portier de Panckouke[1] et demander le petit Lucain[2]. On le trouvera nuit et jour à son bureau. Il recevrait en échange une perruque à trois marteaux dans le genre académique. On ferait d’ailleurs la remise au libraire, si l’acquéreur du Bonnet rouge voulait souscrire pour le Harpiana, ou recueil des bons-mots de l’auteur de Gustave. Cet ouvrage est imprimé : il aurait déjà paru ; mais l’éloge que l’auteur doit en faire dans quelques journaux qu’il rédige, ne l’est pas encore.


L’abbé de Boislaurette. — Il fut curieux : aumônier de la garde nationale parisienne, il qualifia le vœu de continence des ecclésiastiques, de vœu insensé, sacrilège, antisocial, etc. « Mais s’écrie-t-il éloquemment, quelle puissance pourra relever de ce vœu ? Rome ? Dans cette sainte cour, on ne termine rien. Les affaires s’y font si lentement… si lentement !… Et notre mariage est si pressé ! si pressé ! et moi, comme l’un des aumôniers de l’armée parisienne, je suis si pressé, si pressé de lui donner un bon soldat !… Sorbonne, prends tes fourrures, assemble-toi et prononce. Censure si tu veux, excommunie, anathématise ; je ne crains point ta foudre. Vel duo, Vel nemo ; voilà la seule thèse que je te présente ; elle est sacrée, elle est sublime ; si tu oses la déchirer, le roi de la nature te condamne et m’approuve. Avec son approbation, je me passerai de la tienne. »

Comment la religion, la religion de celui qui a maudit le figuier stérile, a-t-elle pu faire un crime d’un plaisir que les anges bénissent autour du lit nuptial, en se couvrant le visage de leurs ailes, de peur sans doute d’envier à la terre un bonheur qui n’est pas celui du ciel ? Est-il donc si facile

  1. Célèbre éditeur-libraire.
  2. La Harpe avait traduit Lucain.